Challenge AZ.C : Sélestat… le C.hili… l’Algérie

Mon patronyme est parti d’Alsace pour le Chili, pour se rendre ensuite en Algérie et enfin revenir en 1962 sur notre terre d’origine, la France. Quel incroyable périple !

À vous qui êtes si loin d’Alsace !
À vous, lecteurs des 5 continents qui suivez notre blog et le lisez régulièrement.
Aujourd’hui, nous pouvons nous déplacer facilement dans le monde entier. Mais quelle aventure du temps de nos ancêtres ! Vous nous avez parlé de vos racines alsaciennes, vous nous avez raconté comment vos aïeux ont quitté l’Alsace,  quels chemins ils ont empruntés…
Dans le cadre du Challenge AZ des blogs de généalogie, tout au long de ce mois de novembre 2023, nous partageons vos récits d’émigration. Ils nous rapprochent de vous et de nos racines communes. Merci et bonne lecture !
Comment suivre le Challenge AZ édition 2023

Engendré par un père alsacien, mon grand-père Alphonse est né le 2 août 1872 à Santiago du Chili. Il se marie le 1er juillet 1905 à Zurich (Algérie) avec Angèle Incarnation Navaro et décèdera le 31 décembre 1944 à Alger.

Sélestat en Alsace

Le père d’Alphonse, mon arrière-grand-père François Xavier, est né le 13 novembre 1823 à Sélestat (archives départementales du Bas-Rhin). Son père Michel Jean Baptiste (né le 28 septembre 1782 à Sélestat), pêcheur et jardinier, épouse d’abord le 8 octobre 1806, Odile Paquet. Le couple a eu huit enfants connus : Odile (1807-1844), Marie Madelaine (1809-1877), Jean Baptiste (1811-1891), Marie Anne (1813 -1815), Antoine (1815-1875), Joseph (Jean dans la marge du registre) (1817), Georges (1819-1852) et enfin François Xavier (1823-1879).

On peut noter que tous issus du même père et de la même mère, leur nom a été enregistré dans les registres de naissance de manières différentes

  • Dans le recensement de Sélestat en 1836, la famille habite « porte de Strasbourg » et se compose de LARMÉE Jean, Jardinier (52 ans), LARMÉE Jean Baptiste, jardinier (23 ans), Antoine, Jardinier (21 ans), LARMÉE Joseph, jardinier (18 ans), LARMÉE Georges, jardinier (16 ans) et LARMÉE Xavier, jardinier (12 ans). Marie Madelaine mariée en 1836 a quitté le foyer paternel, la maman, Odile, est décédée en 1826.
  • Dans le recensement de Sélestat en 1841, la famille réside Hors de la Porte de Strasbourg à Sélestat, on note : LARMÉ Jean Jardinier Catholique, JAEGER Gertrude, la nouvelle femme que Jean a épousée le 13 juillet 1836 et LARMÉ (François) Xavier, mon arrière-grand-père.
  • Dans le recensement de Sélestat en 1846, tous les enfants ont quitté le domicile familial. François Xavier a eu 20 ans en 1843.
  • On trouve Xavier dans le tableau de recensement pour la classe de 1843 conservé aux archives de Sélestat. Il porte le numéro 104, avec la décision du Sous-préfet : frère au service. A-t-il alors été exempté ?

De source familiale, il semblerait qu’il ait été tout de même militaire en remplacement d’un autre appelé. Pour confirmer cette supposition, il faudrait connaitre le nom de cet autre appelé et trouver le nom du notaire spécialisé dans la transaction de remplacement, à titre onéreux.

En premier lieu j’avais cherché les noms des corps d’armée se trouvant à Sélestat entre 1843 et 1856 :  le 10ème dragon remplacé en 1846 par le 2ème dragon, le 1er bataillon du 7ème régiment d’infanterie, le 30ème régiment d’infanterie en 1847 (la cavalerie était représentée par le 7ème hussard qui quitte Sélestat en 1850), puis le bataillon du 74ème de ligne, réduit en 1851 à un simple détachement du 16ème léger, auquel succède un autre du 64ème en 1852 et du 24ème en 1853…

Recensement de Sélestat en 1841 note une garnison
du 69ème régiment de ligne et du 5ème régiment de lanciers
(sans précision des noms).
Mais, voilà que tout change !
Je remercie tout particulièrement Irène Z. qui s’est rendue aux archives de Sélestat pour consulter les demandes de passeport, les tableaux de recensement militaire et différents registres ainsi que Christine H et Christine LD pour toutes les recherches complémentaires effectuées en parallèle qui ont enrichi cette chronique de nouveaux éléments et d’un autre point de vue.
  • Le 16 juin 1844, Xavier fait une demande de « passe-port pour l’intérieur » afin de se rendre à Paris, le document ci-dessous se trouve aux archives de Sélestat, est-ce un indice pour retrouver sa trace militaire ?

Je ne peux faire que des suppositions : François Xavier, le petit dernier resté seul au domicile de son père et de sa nouvelle femme, a-t-il été réformé par le Sous-Préfet parce que son frère Georges était déjà en « Service » ? A-t-il voulu le rejoindre afin de s’engager aussi ? mais… pourquoi Paris ?

  • Il existe, sur le site de la BnF, un article concernant le meurtre de Gertrude Jaeger le 27 aout 1848.  Son beau-fils Georges, marin libéré récemment de ses obligations militaires est arrêté. Celui-ci sera condamné aux travaux forcés à perpétuité par la Cour d’assises du Bas-Rhin en décembre 1848. L’article paru dans le Droit du 22 décembre, développe tout le suivi de l’affaire. Georges se pourvoit cependant en cassation et décède le 21 juin 1852 à l’hôpital maritime de Toulon. Nous apprenons par le père que les enfants du premier lit vouaient une haine féroce à leur belle-mère Gertrude. Joseph fut d’ailleurs le premier à être suspecté puis à être rapidement innocenté.

Le CGA a fait le relevé de tous les bagnards alsaciens de Toulon. Leurs noms ont été reportés petit à petit dans les bulletins trimestriels avec souvent les circonstances de leurs condamnations. Je retrouve Georges Laermé, taille d’un mètre 65 centimètres, cheveux et sourcils châtains, front très haut, yeux gris-bleu, nez moyen, bouche petite, menton pointu, visage allongé, teint coloré… François Xavier lui ressemblait-il ?

  • Jean, le père de Xavier âgé de 70 ans, se remarie, quelques mois après le décès de sa seconde épouse, une troisième fois le 8 janvier 1849 avec Marie Anne Lommel (53 ans). Ses enfants ne sont pas témoins.
  • Le 2 octobre 1850, Xavier, jardinier demeurant à Sélestat, est noté comme témoin lors du mariage de son frère Antoine dans cette ville. Est-il revenu spécialement à cette occasion ?
  • Le recensement de 1851 enregistre uniquement la présence de Joseph (34 ans) au domicile de son père Jean et de sa belle-mère Marie Anne.
  • Sur le recensement de 1856, seuls sont enregistrés Jean et sa femme.
  • Publication des bans de Jean-Baptiste à Belfort le 25 juin 1857.
  • Le père de Xavier, Jean décède le 19 mai 1858 à Sélestat. Sont présents Jean-Baptiste et Antoine.
Mais où donc se trouve Xavier ?
Mes recherches sur les différents sites de généalogie me conduisent au Chili. Même si je ne connaitrais jamais les détails des aventures de son voyage, du choix de ce pays et de sa vie sur place, je m’interroge beaucoup et serais curieux de découvrir ses motivations, sa vie en Amérique latine (l’émigration alsacienne est un fait reconnu des généalogistes).
Parfois les archives, les bibliothèques, les thèses universitaires ou autres, les documents que l’on possède… laissent entrevoir certaines pistes.

Mais, dans la pratique … comment trouver la trace de son départ vers le Chili ?

Plusieurs pistes s’offrent à moi :

  • Xavier aurait-il rejoint son frère à Toulon ? (Pas de listes militaires en ligne aux archives départementales du Var). Ne voulant négliger aucune piste, je consulte tout de même les recensements de Toulon en 1846 et 1851.
  • Georges était marin, le passeport de 1844 de François Xavier pour Paris le rapproche du Havre. Ne l’ayant pas trouvé dans des listes des passagers peut-être s’était-il engagé comme marin pour débarquer en Amérique latine. Je consulte la liste du personnel de la marine militaire sur le Service Historique de la Défense, puis les marins entre les années 1844 et 1857 dans les inscriptions maritimes sur le site des archives départementales de Seine Maritime (cette rubrique concerne les registres de matricules des gens de mer recensés pour les quartiers de Rouen, le Havre, Honfleur et Paris). Il en faut de la patience pour consulter tous ces registres. Mes recherches sont infructueuses.
  • Il fallait à François Xavier un passeport pour l’extérieur. Les demandes aux archives de Sélestat ne vont pas au-delà de 1849. Je poursuis alors mes recherches dans celles du Bas-Rhin. Les autres sources de demande de passeport en ligne sont celles des archives de la Gironde.
  • J’ai même envisagé l’idée d’un passeport groupé permettant à un groupe d’habitants de Sélestat de partir ensemble.

Santiago du Chili

François Xavier se marie dans la paroisse Sainte Ana de Santiago du Chili le 6 juillet 1860 avec Hersilie, Elisabeth, Louise Lagrange née le 9 novembre 1845 à Macornay (Jura) près de Lons le Saulnier. Xavier a bientôt 37 ans ; Hersilie n’a pas encore 15 ans ! L’acte de mariage a été retranscrit et certifié conforme à l’original par les Archives Paroissiales de Santiago du Chili. « Cet acte (page 127 du registre n°9) a été certifié conforme avec l’original. Il a été timbré et signé à Santiago du Chili le 9 octobre 2008. »

  • Janvier 1856 : Dans leur acte de mariage, il est indiqué que François Xavier est depuis 4 ans et demi au Chili. Il serait donc arrivé dans ce pays vers janvier 1856. Son bateau serait passé par le Cap Horn. Mes recherches aux Archives Départementales de Rouen pour retrouver le rôle d’équipage ou d’embarquement de mon aïeul François Xavier LERMÉ sont restées vaines à ce jour.
  • Juillet 1857 : Hersilie arrive avec son père Lagrange Jean-Pierre au Chili. Elle a 12 ans. Hersilie est bien enregistrée sur le recensement de 1851 (Archives départementales du Jura) avec son père Jean Pierre (maréchal), sa mère Joséphine Mouret et son petit frère Joseph. Ils n’apparaissent plus dans le recensement de 1856.
  • 6 juillet 1860, mes arrièregrands-parents se marient. Sur sa première lettre du 1er mai 1861 envoyée à sa mère Joséphine, Hersilie ne dit pas qu’elle s’est mariée. Dans l’acte de décès de Joséphine du 12 avril 1861 à Macornay, il est spécifié que son mari est domicilié en Amérique.
  • Août 1864 : Arrivée du père de mon arrière-grand-mère paternelle, LAGRANGE Jean-Pierre, et de son fils, LAGRANGE Joseph. Ils sont partis du Havre. J’ai pu obtenir la copie du Certificat d’embarquement sur le Clipper « Éclair » en faisant appel au Groupement Généalogique du Havre et de Seine Maritime.

Le couple Lermé/Lagrange habite H. Herreira de Don Eduardo Hermette. Calle de los Téatinos, N° 51. Leur vignoble à proximité de la rivière Mapocho qui passe à Santiago du Chili. A « dix-huit lieues » de San José Cajon de Maipu.

Le couple aura 8 enfants : Jean Pierre Louis (1863), Eugène Charles (1864), Joseph Marie Louis (1866), Isabelle Delphine (1868), François Xavier (1870-1931), Alphonse (1872-1944) mon grand-père, Jules Albert (1875), Louise Ernestine (1877).

  • 12 février 1873 : Départ de leur fils LERMÉ Charles et de son accompagnateur, Mr SAMULO, pour la France. Ils auraient débarqué à Saint-Nazaire. Les recherches par les Archives Départementales de Loire Atlantique ou ADLA n’auraient retrouvé aucun bateau (3 mâts et paquebot) en provenance du Chili. Charles dit « Carlito » fera son service militaire en France puis, s’installera au Chili pour s’y marier trois fois.
  • 13 juin 1879 : François Xavier décède à Santiago du Chili. Il a été inhumé au cimetière général. Il a été jardinier, viticulteur, forgeron et militaire. Ses fils lors de leurs mariages ont dû présenter de son acte de décès. L’acte est inscrit sur la page 294 du Registre n° 18. Acte retranscrit et certifié par les Archives Paroissiales de Santiago du Chili. Il a été transcrit par le ministre de France au Chili, traduction conforme faite par le Vice-Consul d’Espagne à Cherchell le 2 juillet 1885, légalisé à Blida le 30 mai 1892.

François Xavier a donc bien émigré vers le Chili. Différents éléments pourraient l’expliquer : 

« Sélestat souffre des Guerres napoléoniennes. En 1813, ses actes de décès indiquent la mort de 536 soldats, tués au cours de la campagne de Russie. L’année suivante, la ville est assiégée par les Bavarois, mais elle ne tombe pas, malgré des bombardements, plusieurs centaines de morts et une épidémie de typhus. En 1815, après la bataille de Waterloo, Sélestat subit un blocus conduit par des Wurtembergeois, des Saxons et des Autrichiens pendant deux mois. […] En 1828, Charles X passe à Sélestat, puis Louis Philippe en 1831 et Louis-Napoléon Bonaparte en 1850. » Source : Histoire de Sélestat de 1789 à 1870 .

La crise industrielle provoque une importante émigration vers l’Amérique (45.000 entre 1815 et 1870). La grave crise économique alsacienne des années 1846 à 1850, pourrait expliquer sa motivation pour s’expatrier au Chili. Les départs ont été très nombreux vers 1854. D’après une cousine, François Xavier LERMÉ aurait été rétribué pour faire le service militaire à la place d’un appelé, ce qui lui aurait permis de partir et d’arriver au Chili en janvier 1856. Les recherches sur son port d’embarquement et sa demande de passeport pour se rendre au Chili sont pour l’instant restées infructueuses.

L’émigration Alsacienne au Chili au 19ème siècle

En 2017, je fais appel aux membres du CGA IDF pour m’aider à retrouver la liste des 200 personnes de l’arrondissement de Sélestat qui se seraient exilées en Amérique du Sud, probablement à partir du Havre. Il devrait être sur cette liste. Pourquoi cet exil ? Mes recherches aux Archives Départementales de Rouen pour retrouver le rôle d’équipage ou d’embarquement sont restées vaines à ce jour. Pour la période 1831-1861, des « recruteurs » ou auswanderungsagent étaient actifs en Alsace. Ils avaient des appuis chez des notables. Ils incitaient les Alsaciens Lorrains à émigrer en « Amérique Latine », principalement au Pérou, au Venezuela et en Uruguay. Dans l’arrondissement de Sélestat, un recruteur, agissant pour une société sise à Nantes, parcourait les campagnes et engageait la population à se rendre au Venezuela. Une affiche aurait été placardée dans Sélestat. Les émigrants embarqués au Havre de 1855 à 1862, présents au Chili, sont au nombre de 819 : rapports du Commissaire à l’émigration du Havre du 31 juillet 1862. Les départs ont été très nombreux autour de l’année 1854. Pour ce qui est de l’émigration d’Alsaciens vers l’Amérique du Sud, tout particulièrement en Argentine et au Brésil, elle s’est faite principalement entre 1850 et 1865 et a servi de lieu de transit vers le Chili. Ce pays était alors bien structuré, avec de solides colonies d’européens et de nombreuses possibilités.

Une piste m’est fournie sur un habitant de Sélestat, ouvrier serrurier, anciennement condammé, ayant fait une lettre de demande de passeport pour l’Argentine auprès du préfet. Il signale une affiche exposée à la Mairie proposant aux émigrants désirant se rendre à Buenos-Aires et annonçant qu’un bâtiment de 1000 tonnes  « l’Indient » partirait du Havre le 10 9bre prochain… (ABR, 3M 820, dossier de surveillance légale). Cette piste n’a pas aboutie, aucune trace de l’affiche pour l’instant.
Il existe plusieurs exemples d’arrivées massives d’Européens organisées officiellement par les autorités chiliennes. C’est le cas des colons allemands recrutés en Allemagne et amenés au Chili par Vicente Pérez Rosales, agent du gouvernement de Santiago vers la moitié du XIXe siècle. La loi d’“immigration sélective”, édictée par le gouvernement en 1845, a permis à ces immigrants de coloniser et de peupler de vastes régions du Sud chilien (Valdivia, Osorno, Llanquihue). À cette époque, les problèmes des terres ne se posent pas : on applique en fait le droit du premier occupant. À l’heure actuelle, les autorités estiment que le nombre de descendants de ces premiers colons oscille entre 500 et 600 000. Source : Le Chili et les mouvements migratoires, et la colonie et la culture française comme instruments de pénétration de France au Chili.

Des questions sont encore sans réponse. Où François Xavier a-t-il été militaire ? Quelle est donc cette mystérieuse affiche qui a entrainé tous ces habitants de Sélestat vers l’Amérique latine ? Par quelle route et quels moyens est-il arrivé au Chili en 1856 ? Un de vos ancêtres est-il parti de Sélestat à la même époque vers l’Amérique latine ?

Après le décès de son mari François Xavier en 1879, sa femme Hersilie quitte le Chili en mars 1880 sur le Galicia, via le détroit de Magellan avec ses enfants. Ils arrivent à Bordeaux le 1er mai 1880 après 35 jours de navigation. Puis ils vont à Marseille pour se rendre à Alger.

Zurich en Algérie

Hersilie est accueillie par son père Jean-Pierre Lagrange, domicilié à Guyotville, dont le départ définitif du Chili avait précédé celui de sa fille Hersilie et de ses petits-enfants.

Guyotville, au départ village de pêcheurs, est créé en 1845 (voir la description dans l’annuaire général de l’Algérie en 1880 par Charles Gouillon). De nombreux colons s’y installent.  En 1876, la population comptait 595 habitants dont 249 français et 337 espagnols.

Des documents et des lettres transmis par un membre de la famille, me fournissent certaines explications sur l’installation de la famille en Algérie :

– Feuille de renseignements du 26 septembre 1880 pour répondre à une demande de concession à Guyotville. Cette ville est située au centre-nord de l’Algérie et à l’Ouest d’Alger distante de 16 km.

  • « Durée du séjour dans la commune » : depuis 5 mois à Guyotville
  • « S’est toujours adonnée à la culture » (comprendre agriculture)
  • « Moralité irréprochable »
  • « Possède quelques immeubles en France de très peu d’importance »
  • « N’habite l’Algérie que depuis 5 mois, auparavant au Chili pendant 18 ans »

– sa lettre du 19 octobre au Préfet d’Alger : demeure à Guyotville, Ferme Rondeau, Plateau Raïnen

– lettre du 2 novembre 1880 du Préfet du Jura de Lons le Saunier au Préfet d’Alger :

  • Elle habite toujours à Guyotville
  • Il signale : « son mari Alsacien, ancien Militaire, exploitait aux environs de Santiago du Chili un domaine d’une assez grande importance et qui était sa propriété. Des revers de fortune ont atteint cette propriété naissante ; puis la mort est venue qui a saisi le chef de famille au milieu de ses efforts courageux et sa femme et ses 7 enfants ont dû renoncer à la concession d’un bien qui a bientôt été la proie de créanciers inflexibles »

– sa lettre du 18 janvier 1881 au Préfet d’Alger :

  • « Elle a fait l’acquisition d’une petite maison à Zurich
  • Lettre N° 16276 du 5 novembre 1880 du Préfet d’Alger
  • Elle a choisi la concession de Bled Bakhora

– sa lettre du 23 octobre 1881 de Zurich, près de Marengo, au Préfet d’Alger :

  • Elle a attendu l’attribution de la concession de Bled Bakhora. Sa demande N° 16276 du 4ème bureau
  • « Comme lesdistributions se font depuis fin septembre et octobre, je désirerais savoir si je suis admise dans la répartition des Concessions pour l’endroit plus haut désigné »
Source piccclick : aqueduc romain à Cherchell

Des articles trouvés en ligne sur le site de la BNF (Presse et revues) m’apporte plusieurs autres précisions.

Hersilie a eu d’autres enfants d’une relation en Algérie : Gaspard (1881), Jean (1884).

Huit mois après son père Jean-Pierre, Hersilie décède le 28 août 1884 dans la même localité à Zurich (Tipaza) commune de Cherchell Algérie, à l’âge de 38 ans, mon grand-père Alphonse n’a que 12 ans.

Les enfants de François Xavier et d’Hersilie parlaient entre eux de leur passé au Chili, mais jamais à leurs propres enfants.

On trouve encore ce patronyme au Chili avec une descendance d’Eugène Charles. L’histoire de la famille Lermé se poursuit en Algérie. Je suis revenu en France en 1962 après l’indépendance de l’Algérie. La boucle est « bouclée ».

« Les vivants ne peuvent rien apprendre aux morts ; les morts, au contraire, instruisent les vivants. » 
Chateaubriand (Mémoires d’outre-tombe)

Bernard Lermé – membre CGA IdF

Compléments :

Archives militaires ANOM : famille Lermé en Algérie Française. Elles m’ont permis de valider les dates de naissance des enfants de François Xavier. Charles Eugène (pâtissier), engagé volontaire en Algérie pour 5 ans (1884-1888), ne s’est pas présenté aux convocations pour la réserve, habitait au Chili. Louis (charron), François Xavier (cultivateur), Alphonse (caviste), Albert (charron) sont également dans la base. Le nom de Jean Pierre Louis, l’ainé, n’apparait pas.

Le petit journal de Santiago, article sans réponse malheureusement.

Pour aller plus loin…

Plusieurs ports français ont servi à de départ d’émigrants sur des compagnies françaises vers l’Amérique du Sud :

Le Havre était l’un des ports les plus importants de France pour les voyages transatlantiques vers l’Amérique latine. De nombreux émigrants français et européens prenaient des navires au départ du Havre pour se rendre en Amérique latine.

Bordeaux était un autre port majeur pour les voyages vers l’Amérique latine. Il était particulièrement impliqué dans le commerce du vin et a vu un certain nombre de départs vers des destinations en Amérique latine.

Nantes était également un port important pour les voyages vers l’Amérique latine. Il était notamment associé au commerce triangulaire et à la traite négrière, mais il y avait aussi des départs de navires vers des destinations en Amérique latine.

Bien que Marseille soit plus connu pour ses liens avec la Méditerranée, il y avait aussi des voyages vers l’Amérique latine au départ de ce port.

Cherbourg était un port de départ moins fréquent, mais il a également vu des départs vers l’Amérique latine à cette époque.

J’ai consulté toutes leurs archives départementales afin d’exploiter des éléments en ligne : les archives des marins dans les archives de Seine-Maritime, les archives de Bordeaux, les recensements de Toulon dans les archives du Var (voir plus haut) …

On peut aussi interroger en ligne le fichier des noms de personnes ayant demandé à Bordeaux des Passeports pour l’étranger (1800 – 1889). Les demandes pour le Chili remontent à 1928.

Avant d’aller plus loin, il est important de connaitre le décret impérial du 15 janvier 1855 relatif à l’émigration européenne paru au Bulletin des lois (source Gallica). Il laisse une grande importance à L’Alsace. Je vous laisse le consulter pour connaitre toute la réglementation de l’immigration à cette époque, les agences d’immigrations, les visas, les conditions de transport vers les ports d’embarquement, les conditions de voyage sur les bateaux etc.

Une autre piste possible s’impose : les agences d’émigration.

Répartition des agents et sous-agents des cinq premières agences d’émigration, accréditées à la suite du décret du 15 mars 1855 – Tableau Bas-Rhin et Haut-Rhin Source : L’émigration étrangère et l’émigration alsacienne aux États-Unis

Source Numistral
Source Numistral

Pour les alsaciens, les archives départementales du Bas-Rhin me fournissent aussi quelques pistes : dans leur ressource pédagogique sur l’émigration, un ensemble de documents nous donne une bonne idée du contexte de l’émigration des habitants de Wissembourg vers les Etats-Unis. Je relève plus particulièrement le document n° 5 . Il s’agit d’un courrier de l’Agence Générale de Strasbourg de l’Union Maritime adressé le 4 février 1856 au commissaire de l’émigration de Strasbourg au sujet des passagers. . On peut consulter également le document d’aide très complet précisant l’état des sources (avec les numéros des cotes) sur l’émigration alsacienne au 19ème siècle : passeport à l’intérieur et à l’étranger, intérieurs, agents et entreprise d’immigration etc.

Les archives départementales du Haut Rhin (cote 04M et cote 08AL1) fournissent en ligne des listes d’émigrants Haut-Rhinois : 1800-1870 et 1871-1918.

Mais encore…

Dans quelques cas, les émigrants se sont enregistrés chez des agents d’émigration. Les registres et papiers de ces agents commencent à refaire surface et à être dépouillés. On trouve par exemple :

En adhérant au Groupement Généalogique du Havre et de Seine-Maritime (GGHSM) ont peut accéder à une liste de passagers… je ne l’ai pas fait pour l’instant.

Le site Gen Francesa : avec Declaraciones de defunciones, Inmigrantes franceses dptos 64 y 65, Pasaportes renovados en Buenos Aires, Indice Registro 84  (il suffit de faire votre recherche en tapant le patronyme dans la case « Buscar ».

On peut également consulter les registres de l’état-civil de Santiago-du-Chili, dans lesquels on ne peut trouver que les événements déclarés au Consulat par la famille (ce qui n’était pas obligatoire) :

De façon plus générale :

Documentations sur l’immigration :

Autres sites :

  • CEMLA,Centro des Estudios Migratorios Latinosamricanos : arrivées à Buenos-Aires uniquement
  • Émigration depuis un port français vers l’Amérique du Sud : 4 ports français ont servi à de départ d’émigrants sur des compagnies françaises : Marseille, Bordeaux, Cherbourg et Le Havre.
  • Amitiés généalogiques bordelaises : on peut y trouver des listes d’embarquement, d’émigration, d’engagés … sur Bordeaux
  • Le catalogue de FamilySearch : comprend les rôles de l’équipage, des passagers, des passagers clandestins, des déserteurs, des morts en mer, des engagés et des noyés. Registres d’entrée et de sortie des bâtiments de commerce. Les rôles d’équipage des bâtiments de commerce sont dans l’ordre chronologique de leur désarmement au Havre à partir de 1828. (Microfilmage des originaux dans les Archives départementales, Rouen).
  • Archives diplomatiques de Nantes : on trouve les registres d’état-civil du Consulat de Santiago-du-Chili de 1832 à 1898. La recherche est à faire sur place (mode d’emploi).
  • Archives départementales de Seine-Maritime : rechercher un marin, rechercher un passager, rechercher un bateau
  • Centre Havrais de Recherches Historiques (CHRH)
  • Site du désarmement havrais :

« Le rôle de désarmement est un document administratif, établi en fin de campagne, dans lequel on trouve : 
– le nom du bateau et ses caractéristiques physiques
– le nom des armateurs, du propriétaire majoritaire et du commandant de bord
– la composition de l’équipage, par ordre hiérarchique, avec l’âge (la date de naissance à partir du XIXe), la parenté, le grade, le quartier d’inscription maritime où est inscrit le marin, son numéro matricule et une description physique
– le détail du voyage entrepris et en particulier la liste des différentes escales.
– le nom des passagers, avec date et lieu d’embarquement et de débarquement.
– souvent un certain nombre d’informations concernant les évènements survenus à bord pendant la campagne : désertions, décès, vols, incidents divers . . .
 »

La recherche :  hommes (tris par : marins, matricules, armateurs, mères, épouses, passagers), navires (tris par : noms, chantiers, destinations, armements, dates, naufrage).

Remplacement militaire :

Si, comme il est possible que François Xavier LERMÉ ait remplacé un appelé au service militaire, la méthode serait :

  • Trouver au chef-lieu de canton la liste du conseil de révision de l’intéressé qui aurait tiré le bon N°, l’exemptant.
  • Trouver le notaire spécialisé dans la transaction de remplacement, à titre onéreux.

Un site ci-après comme exemple du cas qui vous intéresse sur la Gironde par Cahier d’archives 

Peut-être que ces éléments vous aideront dans vos recherches !
Un travail minutieux et patient vous attend.

C L-D, membre de la section IdF du CGA

Mercredi 1Adieu chère Alsace
Jeudi 2Alsatian emigration to the Black Sea

6 commentaires

  1. Le cas de mes AAgp est un peut different,ils sont parti au Havre depuis Goecklingen avec l’intention de se rendre au Texas,mais ils ont été détourné vers l’Algérie en 1830, c’était les premiers colons ,il ont débarqué à Sidi Feruch puis en 1962 nous voila de retour en France

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    1. Merci René pour votre message. Cela nous ferait vraiment plaisir que vous nous racontiez l’émigration de vos AAGP et leur installation en Algérie. Nous continuerons à publier vos récits après le challenge AZ, en 2024. N’hésitez pas à nous écrire !

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  2. This is a fascinating story. Thank you for telling it. I hope you are able some day to discover why you family chose Chile (or even the continent of South America) as a destination. Will we ever know how much of such a decision was planned and who much was just random chance?

    Machine translation:
    C’est une histoire fascinante. Merci de l’avoir racontée. J’espère que vous pourrez un jour découvrir pourquoi votre famille a choisi le Chili (ou même le continent sud-américain) comme destination. Saurons-nous un jour quelle part de cette décision était planifiée et quelle part était le fruit du hasard ?

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    1. Merci beaucoup Michael pour ce message pertinent ! Nous aimerions tant savoir le pourquoi et le comment… Les choix de nos ancêtres sont encore pleins de mystère !
      Thank you so much, Michael, for this pertinent message! We would so much like to know the whys and wherefores… Our ancestors’ choices are still full of mystery!

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